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Chants Danses du Pays de la Soule
 
 
                                                                CHANTS SOULETINS


Le chant en Soule est plus qu’une tradition, c’est une passion. C’est un chant pur, sans accompagnement, ni claquement de mains ou de doigts. Il évoque dans une simplicité et une plénitude sans égales, des histoires et légendes locales. Le texte est au centre, il s’agit en fait de chroniques chantées que l’on écoute dans un silence quasi-religieux. Toute l’identité du pays est traversée par le chant : les malheurs du cheval d’Ixherra, les démêlées d’Etxahun, la mort de Berterretx, les brebis perdues… Ce chant a capella, du berger solitaire dans sa montagne est parfois repris en petits groupes dans les auberges ou cafés des villages. Les voix doivent être fortes et tendues. Certains chants servent de support aux pastorales. Il est rarement utilisé par des chorales dirigées par un chef, ou des polyphonies aux règles bien établies. Le chant souletins accepte les groupes mais non formels, spontanés. Les auteurs sont adulés, tel Pierre Topet dit Etxahun et Attouli de Barcus, Ligueix de Larrau, Borthuri-Xala et Pierre Bordaçarre de Trois-Villes. La pérennité du chant souletin, proche des chants de bergers de Béarn et de Bigorre est essentiellement due au foisonnement des auteurs (1).
(1) Un des plus anciens bertsulari réputé fut Beňat Mardo de Barcus, au XVIIIe siècle.

Musique contemporaine.

Nous ne devons pas oublier que l’évolution du chant et de la musique traditionnelle de Soule a engendré de nombreux auteurs contemporains proches du monde rock et dont le chantre incontesté est Niko Etxart. Ce dernier reconnu comme le créateur du rock basque, enregistre ses albums dans son propre studio Kilikas à Altzai. Il est souvent accompagné par pléthore d’artistes locaux talentueux comme le démontre son dernier cd : Minuette. Il est distribué par le label d’Egoalde, Elkarlanean. Il suit de près Eperra.
Un chanteur à part : Peio Serbielle. Chantre du nomadisme et du métissage cet artiste proche de la world music est un auteur engagé. Il a été soupçonné de collaboration avec l’ETA. Un de ses derniers disques sortis chez Sony, a pour titre Egon : le chant des légendes basques. Son leitmotiv : « partager la fraternité. »




                                                                    LES  MASCARADES 

La Soule commence l’année par de nombreuses mascarades, genre de carnavals ruraux. La saison des mascarades s’achève le premier jeudi de Carême. La tradition de la danse basque se manifeste ici avec beaucoup de bonheur. Chaque dimanche, durant la période de carnaval et dans un village différent chaque année, se déroule un rituel ancestral qui débute le matin. Dans la mascarade, il s’agit moins de se moquer ou de prendre la place pour un temps délimité, des dominants, que d’empêcher symboliquement d’éventuels étrangers de pénétrer dans le village. Le défoulement collectif a pour origine l’exhortation de la peur contre les envahisseurs de la communauté. Aussi, les bons, les villageois déguisés en rouge doivent empêcher les méchants, déguisés en noir de pénétrer dans le village. Des barricades symboliques faites de bouteilles posées à même le sol, sont érigées à l’entrée du village. Elles sont défendues par les gardiens du troupeau de porc avec leur balai à queue de cheval, les bergers (txerreroa) avec leurs grandes paires de cisailles, l’homme cheval ou zamalzaïn, le porte drapeau (ensenaria), l’homme chat (gatuzain), censé déjouer les mauvais sorts, et la cantinière... En face, les méchants, les Noirs, avec leurs danses désordonnées, leurs manières grossières et leurs vêtements bigarrés. Ils représentent les étrangers aux mœurs bizarres, tels les Bohémiens ou buhameak et les sans domicile fixe de toutes sortes qui hantaient régulièrement les villages souletins comme les chaudronniers ou kauterak... Une fois dans la place, les Noirs dansent avec les Rouges dans une immense farandole. Après un copieux déjeuner bien arrosé, l’après-midi est consacrée aux danses et sauts basques au son du tambourin et de la flûte à trois trous ainsi qu‘aux piécettes de théâtre populaire (jeux et farces) La danse la plus attendue des touristes est la godalet danztza. Celle où les danseurs, à tour de rôle, font une série de pas et d’entrechats autour d’un verre plein de vin, avant de monter dessus sans le renverser. La fête se termine par le bralia ou branle (saut souletin) réunissant acteurs et spectateurs. Il est à noter que jadis, seul les hommes participaient à ces festivités comme dans les pastorales. Un bal clôt la fête.

(1) Les instruments divers : clochettes, balais, sonnailles, étaient portés à l’origine, par les danseurs pour chasser les mauvais esprits et les animaux ou insectes indésirables.
mascarade Aussurucq 1 1Mascarade à Assurucq. Photo Jean Guyot

L’évolution

Ces mascarades sont en constante évolution. Elles épousent leur temps. Des personnages disparaissent, d’autres apparaissent. L’époque napoléonienne et ses légendes ont apporté beaucoup sur les pas et les costumes. Les danseurs souletins animaient les nuits de bivouacs lors des campagnes à travers l’Europe. Les significations des personnages inconnus des grognards, ont eu tendance à disparaître au bénéfice des danses athlétiques. Puis, un renouveau à partir de recherches ethnologiques et ethnographiques a permis de remettre sur pied de nouveaux personnages, en rapport avec la culture locale, avec une nouvelle dialectique entre les Rouges et les Noirs. De nos jours, des acteurs expriment de plus en plus par la dérision et la farce, leur désaccord sur les actions de leurs supérieurs, approchant par la même, l’essence du carnaval classique où une dialectique burlesque entre élite et peuple, structurait les manifestations.

La polémique

Certains locaux, dont Nicole Langarot via Internet avec par exemple le site mascarades.eu,  ou l'ouvrage Bohémiens édition Gartuza, 2009, semblent découvrir dans les mascarades, une présentation « raciste envers les Tziganes ». Et de prendre pour preuve, la présence dans ces spectacles qui remontent à la nuit des temps, d’un cheval, de violons et d’une cantinière, « éléments proches de la culture tzigane de Roumanie ». C’est oublier tout d’abord, que le racisme est une idéologie récente, mise en exergue par Gobineau en 1853, dans son « Essai sur les inégalités des races » et qu’en Roumanie se sont plutôt des Roms. Le mot Tzigane, bien que nom générique, de ces tribus de nomades venues d’Inde, est plutôt utilisé pour la Bohème Hongrie.

Les Noirs dans les mascarades représentent tantôt le mal, tantôt effectivement, les exclus, ceux que la population ne peux accepter dans son sein, du fait de leur origine ou leur style de vie. Mais il s‘agissait autant des castreurs (hongreurs) du Béarn, montreurs d’ours de l’Ariège, chaudronniers du Cantal ou autres ambulants, que des Bohémiens, gitans ou Égyptiens (le terme Tzigane est rarement employé). Les Cagots et descendants supposés de Sarrasins pouvaient éventuellement faire partie des Noirs. Au cours des siècles, la liste des indésirables pouvait changer. Il s’agissait pour les populations locales d’exorciser dans leur spectacle, leur peur de ces étrangers, sans domicile fixe, sans religion et « voleurs de poules ou de chevaux ». Quant à la cantinière, elle est présente aussi au carnaval Biarnès, c’est la maîtresse de Sent Pançard (le roi Paillard), elle aurait été introduite lors des épopées napoléoniennes, comme beaucoup d’éléments décoratifs des costumes et n’a pas de rapport, semble-t-il, avec les Tziganes. Le cheval du Zamaltzain viendrait de la légende médiévale de Baïar, monture des frères Aymon (pour certains il représenterait le roi Santxo le Fort ou un Centaure) ; quant au violon, il était pratiquement inexistant dans les mascarades (et pastorales) et son origine est italienne. Les Tziganes l’ont seulement adopté au XVIIe siècle.
Il est vrai que ces vagabonds, dont certains bons Souletins disaient atteints de « folie ambulatoire », étaient fort mal acceptés par les autorités qui pensèrent un temps les envoyer dans les îles à sucre, remplacer les esclaves noirs. Bonaparte n’eut pas le temps de réaliser ce projet du Consulat. Au XIXe siècle, leur sort ne fut pas plus enviable, souvent chassés à coup de fusil par les locaux, menacés de bagne, beaucoup se réfugièrent en Espagne, certains se sédentarisèrent. Il n’en demeure pas moins, qu’ils font partie de l’histoire locale et que les supprimer des mascarades ne serait que falsification historique. Les maintenir, ne nous paraît pas alimenter une xénophobie latente.


mascarade 2
Fin de mascarade à... Photo Jean Guyot

Les
danseurs

Les principaux personnages au nombre de cinq, sont ceux qui marchent devant. Ils inaugurent le cortège. Généralement, ce sont les meilleurs danseurs. Nous avons :
- Le Txerrero (a) ou l’ouvreur. Veste rouge et culotte noire, c’est le premier à franchir les barricades symboliques. Il porte des sonnailles et un balai à crin de cheval pour chasser les mauvais esprits. Il présente les acteurs-danseurs qui entrent en scène.

- Le Gatuzain (a) (l’homme chat) vêtu d’une tunique bleue et d’une culotte jaune. Sa pince sert à chahuter le public. C’était jadis le bouffon, l’arlequin ; c’est devenu l’expert en danses.

- La Kantiniersa ou Cantinière. Ce personnage date de 1880. Il est influencé par les cantinières des armées napoléoniennes. Il remplace Maka Beltza ou la Maquerelle noire, jugée top lubrique par certaines autorités ecclésiastiques (l’évêque de Bayonne) en visite en Soule. Certains auteurs évoquent Napoléon III.

- Le Zamaltzain (a), l’homme cheval. Très reconnaissable avec son cheval de bois autour de la taille et sa couronne ornée de plumes et de verroteries. Il est censé être un personnage important. Normal c’est un cavalier. Aussi, c’est sur lui qu’iront les quolibets de la foule des Noirs. Ils iront jusqu’à le châtrer en public, comme un vulgaire cheval de trait. Son origine remonte aux légendes du Moyen Âge, connues sous le nom des quatre frères Aymon ou les prouesses du cheval Baïar. Certains y voient la réminiscence du Centaure.
homme chevalLe Zamaltzain. Photo Jean Guyot

L’Entseinari(a). Vêtu de noir, c’est le porte enseigne. Il conduit le branle (bralea) final qui serpentera à la fin du spectacle autour de la place du village.

Une plaquette : Danse de Soule par l’association Aitzindariak. Centre culturel de Soule 64130 Mendikota. ' 05-59-28-44-46




                                                                                    LES PASTORALES
 

La pastorale souletine est une survivance du théâtre populaire, héritée des Mystères du Moyen Âge et des Mascarades du Carnaval, mis en forme au XVe siècle.
Le nom Pastorale vient du fait que les acteurs étaient surtout des pâtres. C’est la raison pour laquelle habituellement, elle est jouée au printemps, avant le départ des troupeaux en transhumance ou en automne, à leur retour.

Très vivaces en Europe au XVIIIe siècle, elles perdurent encore de nos jours en Soule. La création artistique offerte, réunie sous une même activité, chanteurs, danseurs et conteurs. Une grande partie du village y participe et les textes sont en xibéro (basque). Il ne s’agit pas des pastorales bigourdanes ou béarnaises où les bergers déclament leur flamme à leur promise, sous forme de poèmes chantés, mais d’un vrai spectacle théâtral. Les thèmes ont souvent pour naissance des évènements locaux, ou qui ont frappé le conscient collectif, et qui sont transmis depuis des générations, par voie orale. Ces évènements sont à l’origine d’une lutte sans merci, entre le Bien et le Mal, Dieu et Lucifer, les bons et les méchants. Ils sont soutenus dans leurs actions, respectivement par des anges et des diables ou satans. La mobilisation de la population autour d’un sujet commun, fait de la pastorale, un facteur unificateur puissant de la vie sociale souletine. La Soule est une des rares régions d’Europe qui a su conserver fidèlement ce mode théâtral.

La mise en scène

La pastorale qui dure plusieurs heures, voire une journée, se déroule au centre du village sur une grande estrade en moyenne 12m X 12m, avec une arrière-scène cachée par un grand drap blanc. Une loge de musiciens assez surélevée accueille l’orchestre composé de joueurs de soinuas (tambourins) et de txixtu (flûtes à trois trous de taille variable). Ils sont chargés d’animer les Intermèdes. Les costumes très en couleur sont codifiés depuis la nuit des temps : le rouge pour les satans et le bleu pour les anges. Pratiquement tout le village devient acteur, des enfants aux vieillards ; les troupeaux sont parfois de la partie.

Le déroulement

Les acteurs ne parlent pas, ils s’expriment par mélopées à trois tons et se déplacent en frappant le sol avec un bâton, selon une cadence préétablie.
Les rouges se déplacent rapidement, par pas saccadés ; les bleus ont une démarche plus solennelle, aérienne, se sont les anges.
Parfois la mélopée se transforme en chant. Et les pas, en danse.
Danses, monologues, chants, interventions divines ou sataniques, jongleries sont le lot des pastorales souletines.

Les sujets

Il n’existe pratiquement aucune trace écrite des pastorales anciennes. Elles se transmettaient par voie orale. Et, vu la liberté des règles à respecter, cela avait peu d’importance. Nous savons que la pastorale Sainte-Élisabeth de Portugal datée de 1750, a été joué à cette époque, le 3 janvier, à Esquiule. Les autres avaient pour noms Robert le Diable, les Quatre fils Aymon, Saint Jacques, Clovis, Charlemagne, Jeanne d’Arc, Jean de Paris, Œdipe, Napoléon Empereur, Guillaume III… Les plus anciennes étaient de caractère religieux, proches des mystères. Les légendes de Baïar : cheval de quatre fils d’Aymon, prirent la suite, suivies des histoires légendées des hommes célèbres du patrimoine populaire.

Le thème de Charlemagne, pourfendeur des Sarrasins était un thème très prisé. Il représentait la lutte du bien, de l’empereur à la barbe fleuri, contre le mal, les envahisseurs infidèles. Sujet combien incongru quand on sait que ce furent les Basques (de Soule et d’ailleurs) qui anéantirent les arrières troupes dudit pas encore Empereur. Le sujet de la Pastorale de 2008 jouée à Espès, avec la participation des habitants d’Arrast-Larrebieu, a pour eu sujet le dernier vicomte, Auger III. Elle est l’œuvre de l’historien Jean-Louis Davant.
Pastorale AthrereyLes chrétiens et les maures
eleonorEléonore d'Aquitaine

L’évolution

L’introduction des chiens de bergers ou autres animaux est assez récente. Comme la présence conjuguée d’acteurs et d’actrices ! Les pièces étaient à l’origine, interprétées, soit par des hommes soit par des femmes. La dernière pastorale « unisexe » date de 1980. Elle a été écrite par Etxahum et avait pour nom Ximena. Le nombre de musiciens initialement de deux est passé à quatre ou cinq, au cours des années, alors que la durée des spectacles a diminué. Vers 1900, est apparue, la clôture des lieux et la généralisation des entrées payantes. Mais, comme le souligne Bernard Oyharçabal : « Les pastorales souletines avec leur enrichissement et leur renouvellement constant des thèmes, restent incontestablement dans le prolongement de la tradition dont elles sont issues. Même si les conditions de leur production, ainsi que la compréhension du jeu dramatique, de ses conventions et de ses références implicites, ont été bien sûr profondément modifiées. » (1).
(1)La pastorale souletine CNRS URA 1055.

Pour en savoir plus sur l'histoire de la pastorale :http://www.euskonews.com/0521zbk/gaia52103fr.html
xiberokojauna Gotein
Affiches de pastorale


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