ARTISANAT Le linge de maison. L'abondance du lin des jardins et de la laine des troupeaux, doublée de la présence importante de cours d'eau dont on utilisait la force motrice, a permis depuis fort longtemps l'installation de manufactures de tissage. Ces tissus aux motifs réguliers, souvent des bandes de couleur rouge ou bleue, ont fait la réputation du Pays Basque et du Béarn, dans toute l’Europe, et sur le nouveau continent grâce aux « apatriés » : à Rio de La Plata via Cadix, aux Antilles et en Louisiane via Bordeaux. Draps, nappes et services de table ont envahi les marchés. Malheureusement, le coton et les tissus synthétiques ont fait leur apparition dans la confection de ces ouvrages et la concurrence anglaise, mieux mécanisée, a fait péricliter cette industrie florissante.
À l'origine, c'étaient des couvertures de lin et de laine, ou
mantas, qui servaient à protéger le dos des vaches, des agressions des insectes. Chaque maison avait sa couleur et sa largeur de trait afin de les reconnaître, lors de la grande lessive au lavoir. Leur simple beauté et leur rusticité en ont fait des éléments de trousseaux de mariage pour familles bourgeoises.
On ne doit pas les confondre avec les lainages des Pyrénées de la Bigorre, faits de laine et de coton à partir d'une idée originale d'un Bagnérais, Pierre Comet, en 1882. Voir le
Guide du Curieux Pays de Lourdes, même auteur, Pyrémonde éditeur.
Précisions historique Ce sont les moines et les chanoines de Saint-Augustin qui furent à l'origine de l'industrie textile de la Soule et du Béarn. Tout est parti de la Commanderie de Mifaget près de Nay. Construite en 1120, pour accueillir les pèlerins de Saint-Jacques, elle s'est vue doublée d'ateliers de confection de draps et de robes de bure pour la congrégation.
Les sandales. Ces chaussures communément nommées
espadrilles étaient faites de toile de lin et de corde de chanvre. Cette corde de la semelle venait de Sparte, d’où son nom espartine qui devint espadrille. Le chanvre fut par la suite remplacé par le jute. Les espadrilles ont permis à des générations de marcheurs et de bergers et aussi de mineurs du Nord (c'est moins connu), d'avoir une démarche souple et légère. Il paraît que les fantassins du roi d'Aragon, au XIII
e siècle, portaient des espadrilles. Leur fabrication était très importante en Soule. Elle faisait vivre plus de mille familles de sandaliers qui travaillaient au début du XIX
e siècle, à domicile, durant la morte saison. Le travail en usine s’est ensuite généralisé vers 1881, grâce aux usines hydroélectriques. Mais vers 1950, les sandales des mineurs furent remplacées par des chaussures de sécurité. Puis la concurrence asiatique de plus en plus vive, a fait chuter les ventes des espadrilles françaises, malgré l’adjonction de la semelle en caoutchouc et la multiplication des modèles, faisant de la sandale un synonyme de détente et de loisir. Généralement, les traditionnelles ont une semelle de corde plus épaisse. Les modèles de nos jours se déclinent sous toutes les couleurs et se portent beaucoup en bord de mer, pendant les vacances.
Usine souletine de sandales. Photo Ikerzaleak
Les espadrilles de Mauléon. Vers 1800, des artisans souletins seraient partis en Espagne se former à la fabrication des espadrilles. Vers 1850, un petit artisanat fit son apparition à Mauléon. Celui-ci se mécanisa vers 1880, grâce aux usines hydroélectriques sur le Saison et à l’introduction d’une machine capable de coudre la toile et la semelle au point de chaînette. Licharre, quartier de Mauléon, sur la rive gauche du Saison, devint un grand centre artisanal. Une dizaine d’usines s’y implantèrent, faisant vivre jusqu’à 1 600 ouvriers. À cette époque, les exportations vers l’Amérique du Sud, où de nombreux Basques s’étaient installés, représentaient jusqu'au 4/5 de la production. Actuellement, cinq fabriques proposent encore en Soule des espadrilles aux touristes. Grâce à la qualité de leur fabrication artisanale et à la variété des formes et coloris, la sandale mauléonnaise tient encore une place de choix parmi les sandaliers. Voir le chapitre « Mauléon- achats. »
Les espadrilles de Mauléon. Photo J. Omnès
Les bardeaux. On peut admirer encore de nos jours, le très beau toit de bardeaux du château Renaissance de Maytie à Mauléon. Pendant des siècles, les toits souletins des maisons les plus riches étaient faits de bardeaux : le bois abondait et la main-d’œuvre n’était pas chère. Les plus solides étaient ceux de chêne. Après plusieurs décennies, on pouvait retourner les bardeaux pour une nouvelle vie. Il faut 30 à 40 bardeaux par m². La pose en trois couches se recouvrant est plus rapide que celle des ardoises et nécessite moins de lattes. Malheureusement faute d’artisans spécialisés, ce type de couverture à tendance à disparaître.
Les makhilas. Si le Béarn est le pays du bourdon, le Pays Basque est celui du makhila. Ce bâton du marcheur et du berger, devenu objet de décoration est à l’origine d’une fabrication très artisanale. Les plus beaux sont en néflier. Si les artisans fabricants sont peu nombreux en Soule, par contre la fourniture des surgeons de cet arbuste est une tradition souletine. Les arbustes sont travaillés avec un petit couteau en S et une roulette, au printemps et en juin-juillet. Les bâtons marqués sont taillés l’hiver, puis chauffés, séchés et poncés. Après coloration et redressage de certains, ils sont envoyés à l’artisan monteur. C’est lui qui fixera les viroles, les douilles de cuivre ciselé et le pommeau de cuir cachant la pointe acérée. Il est de tradition d’inscrire une devise ou le nom du propriétaire sur la douille.